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Anne-Marie Lizin

Entretiens

Soumis par iKNOW Politics le
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December 26, 2006

Anne-Marie Lizin

Entretien de l'Union Interparlementaire (UIP) avec Anne-Marie Lizin, Présidente du Sénat belge

Mme Anne-Marie Lizin est la première femme à présider le Sénat belge. Elle fut auparavant parlementaire européenne et membre de la chambre basse belge. Prenant la parole à l'ouverture du séminaire consacré aux commissions parlementaires sur l'égalité des sexes, qui s'est tenu à La Maison des Parlements, elle a expliqué l'importance des commissions parlementaires sur les questions de genre et la lutte des femmes pour parvenir à la parité.

UIP: Malgré un emploi du temps chargé, vous avez fait escale à Genève…

J'étais particulièrement intéressée par ce séminaire. Tout d'abord, je tiens à féliciter l'UIP pour ses statistiques. Pour la première fois, nous avons des tableaux très utiles avec des chiffres sur les femmes au Parlement et je suggère à toutes les femmes de les utiliser dans leurs pays. Aujourd'hui, nous avons 60 parlements qui ont une commission sur les questions de genre. Cela veut dire que les femmes tentent de travailler ensemble au Parlement et de surmonter les clivages entre les partis politiques. Nous savons tous ce que faire de la politique au niveau local veut dire et il n'est pas facile de surmonter les différences, pourtant il est très important de le faire. Nous constatons une tendance positive en faveur de la création d'un instrument spécial pour l'égalité entre hommes et femmes ou pour améliorer la situation des femmes.

UIP: Les partis politiques doivent-il s'engager davantage dans ce sens?

Les partis politiques sont très importants pour la création de ce type de commission. Nous devons insister à tous les niveaux, local et parlementaire, pour que ce travail soit fait et afin que nous puissions aussi montrer que les femmes politiques font quelque chose de différent. Nous pouvons au moins partager un point de vue qui est de dire que l'homme et la femme sont égaux. Au sein de ces commissions parlementaires, les femmes, mais aussi les hommes, peuvent proposer d'aborder des sujets tels que les quotas ou la parité. En Belgique et en France, nous parlons désormais de parité. Elle concernait tout d'abord la participation de candidates femmes sur les listes électorales à tous les niveaux. Et cela n'a pas été facile parce que la parité est un thème sensible dans tous les parlements, mais elle doit être l'objectif à atteindre pour nous tous. Le pouvoir est la question qui est au cœur du Parlement. Les parlements qui le veulent peuvent avoir du pouvoir, tout au moins juste après une élection, au moment où il faut une majorité pour mettre en place un gouvernement. Et les femmes parlementaires qui le veulent peuvent joueur un rôle important. C'est la façon de changer les mentalités d'un pays pour l'avenir.

UIP: Pourquoi est-il important d'avoir plus de femmes au Parlement?

Parce qu'elles vont réfléchir et proposer des lois qui iront dans le sens de l'égalité, qui est une façon très importante de faire progresser la société. Prenons les lois contre la violence à l'égard des femmes, mesure novatrice dans les parlements, puisqu'il s'agit de pénaliser la violence à l'égard des femmes et de faire en sorte de sensibiliser, au sein de la police et du ministère de la Justice, sur le fait que l'on ne peut plus laisser la violence conjugale sans suite pénale. C'est une nouveauté en Europe et a fortiori dans les autres Etats. Autres exemples : la lutte contre l'excision et le droit des femmes migrantes dans les pays riches.

UIP: Les traditions peuvent-elles être un frein à l'émancipation des femmes?

Dans certains cas elles sont à la base des difficultés et de la justification des différences entre hommes et femmes. Elles sont souvent un instrument de pouvoir pour justifier le fait d'affaiblir les femmes. Les différences culturelles doivent être regardées par les femmes de manière froide. Il faut qu'elles se disent qu'il n'y a plus aujourd'hui, au XXIème siècle, aucun homme qui ne sache pas que sa femme est son égale. Mais certains hommes font semblant de ne pas le savoir, évoquant le fait que Dieu a dit ceci ou cela ou que tel livre a affirmé ceci ou cela ou encore l'usage de telle pratique. Mais ils savent que nous sommes partout leurs égales. Tout cela n'est qu'une façon de retarder le moment où ils devront perdre un peu de leur pouvoir.

UIP: Faut-il travailler plus étroitement avec les chefs coutumiers et religieux?

Oui, il faut convaincre tout le monde, y compris les structures traditionnelles, les chefs religieux, les rois et les chefs coutumiers. Il faut les convaincre qu'il est important que les filles sortent de l'analphabétisme. Le rôle des structures religieuses est important car, en Europe il y a quatre siècles et dans une partie du monde aujourd'hui, les structures religieuses ont eu peur de perdre leur mainmise et leur capacité de donner des orientations, qui sont des éléments de foi révélée, donc incontestable à première vue. Il faut pouvoir les contester tout en respectant le choix de chacun. La religion est un choix personnel et ne doit pas être imposée.

UIP: L'Occident a été à la traîne concernant l'ascension des femmes vers le pouvoir. Cela semble changer aujourd'hui avec l'arrivée de Mmes Ségolène Royal, Nancy Pelosi, Hilary Clinton, Angela Merkel et vous-même. Comment l'expliquez-vous?

Je ne peux faire qu'une analyse personnelle, mais je crois qu'une société où la majorité des citoyens est plus âgée permet aux femmes qui ont de l'expérience d'exercer le pouvoir. Ce ne sont pas des jeunes femmes de 25 ans qui arrivent au pouvoir, mais des femmes qui ont un parcours, et Mme Pelosi en est un bel exemple. Ce sont des femmes qui savent prendre des décisions dans des situations délicates. Nous avons aujourd'hui des sociétés qui sont mûres pour que les femmes puissent jouer le premier rôle au niveau politique.

Ceci est extrait d'un entretien publié sur le site de l’Union interparlementaire, Le Monde des Parlements, Édition 24, décembre 2006, disponible sur http://archive.ipu.org/news-f/24-4.htm

 

Date de l'entretien
Région
Entretien de l'Union Interparlementaire (UIP) avec Anne-Marie Lizin, Présidente du Sénat belge

Mme Anne-Marie Lizin est la première femme à présider le Sénat belge. Elle fut auparavant parlementaire européenne et membre de la chambre basse belge. Prenant la parole à l'ouverture du séminaire consacré aux commissions parlementaires sur l'égalité des sexes, qui s'est tenu à La Maison des Parlements, elle a expliqué l'importance des commissions parlementaires sur les questions de genre et la lutte des femmes pour parvenir à la parité.

UIP: Malgré un emploi du temps chargé, vous avez fait escale à Genève…

J'étais particulièrement intéressée par ce séminaire. Tout d'abord, je tiens à féliciter l'UIP pour ses statistiques. Pour la première fois, nous avons des tableaux très utiles avec des chiffres sur les femmes au Parlement et je suggère à toutes les femmes de les utiliser dans leurs pays. Aujourd'hui, nous avons 60 parlements qui ont une commission sur les questions de genre. Cela veut dire que les femmes tentent de travailler ensemble au Parlement et de surmonter les clivages entre les partis politiques. Nous savons tous ce que faire de la politique au niveau local veut dire et il n'est pas facile de surmonter les différences, pourtant il est très important de le faire. Nous constatons une tendance positive en faveur de la création d'un instrument spécial pour l'égalité entre hommes et femmes ou pour améliorer la situation des femmes.

UIP: Les partis politiques doivent-il s'engager davantage dans ce sens?

Les partis politiques sont très importants pour la création de ce type de commission. Nous devons insister à tous les niveaux, local et parlementaire, pour que ce travail soit fait et afin que nous puissions aussi montrer que les femmes politiques font quelque chose de différent. Nous pouvons au moins partager un point de vue qui est de dire que l'homme et la femme sont égaux. Au sein de ces commissions parlementaires, les femmes, mais aussi les hommes, peuvent proposer d'aborder des sujets tels que les quotas ou la parité. En Belgique et en France, nous parlons désormais de parité. Elle concernait tout d'abord la participation de candidates femmes sur les listes électorales à tous les niveaux. Et cela n'a pas été facile parce que la parité est un thème sensible dans tous les parlements, mais elle doit être l'objectif à atteindre pour nous tous. Le pouvoir est la question qui est au cœur du Parlement. Les parlements qui le veulent peuvent avoir du pouvoir, tout au moins juste après une élection, au moment où il faut une majorité pour mettre en place un gouvernement. Et les femmes parlementaires qui le veulent peuvent joueur un rôle important. C'est la façon de changer les mentalités d'un pays pour l'avenir.

UIP: Pourquoi est-il important d'avoir plus de femmes au Parlement?

Parce qu'elles vont réfléchir et proposer des lois qui iront dans le sens de l'égalité, qui est une façon très importante de faire progresser la société. Prenons les lois contre la violence à l'égard des femmes, mesure novatrice dans les parlements, puisqu'il s'agit de pénaliser la violence à l'égard des femmes et de faire en sorte de sensibiliser, au sein de la police et du ministère de la Justice, sur le fait que l'on ne peut plus laisser la violence conjugale sans suite pénale. C'est une nouveauté en Europe et a fortiori dans les autres Etats. Autres exemples : la lutte contre l'excision et le droit des femmes migrantes dans les pays riches.

UIP: Les traditions peuvent-elles être un frein à l'émancipation des femmes?

Dans certains cas elles sont à la base des difficultés et de la justification des différences entre hommes et femmes. Elles sont souvent un instrument de pouvoir pour justifier le fait d'affaiblir les femmes. Les différences culturelles doivent être regardées par les femmes de manière froide. Il faut qu'elles se disent qu'il n'y a plus aujourd'hui, au XXIème siècle, aucun homme qui ne sache pas que sa femme est son égale. Mais certains hommes font semblant de ne pas le savoir, évoquant le fait que Dieu a dit ceci ou cela ou que tel livre a affirmé ceci ou cela ou encore l'usage de telle pratique. Mais ils savent que nous sommes partout leurs égales. Tout cela n'est qu'une façon de retarder le moment où ils devront perdre un peu de leur pouvoir.

UIP: Faut-il travailler plus étroitement avec les chefs coutumiers et religieux?

Oui, il faut convaincre tout le monde, y compris les structures traditionnelles, les chefs religieux, les rois et les chefs coutumiers. Il faut les convaincre qu'il est important que les filles sortent de l'analphabétisme. Le rôle des structures religieuses est important car, en Europe il y a quatre siècles et dans une partie du monde aujourd'hui, les structures religieuses ont eu peur de perdre leur mainmise et leur capacité de donner des orientations, qui sont des éléments de foi révélée, donc incontestable à première vue. Il faut pouvoir les contester tout en respectant le choix de chacun. La religion est un choix personnel et ne doit pas être imposée.

UIP: L'Occident a été à la traîne concernant l'ascension des femmes vers le pouvoir. Cela semble changer aujourd'hui avec l'arrivée de Mmes Ségolène Royal, Nancy Pelosi, Hilary Clinton, Angela Merkel et vous-même. Comment l'expliquez-vous?

Je ne peux faire qu'une analyse personnelle, mais je crois qu'une société où la majorité des citoyens est plus âgée permet aux femmes qui ont de l'expérience d'exercer le pouvoir. Ce ne sont pas des jeunes femmes de 25 ans qui arrivent au pouvoir, mais des femmes qui ont un parcours, et Mme Pelosi en est un bel exemple. Ce sont des femmes qui savent prendre des décisions dans des situations délicates. Nous avons aujourd'hui des sociétés qui sont mûres pour que les femmes puissent jouer le premier rôle au niveau politique.

Ceci est extrait d'un entretien publié sur le site de l’Union interparlementaire, Le Monde des Parlements, Édition 24, décembre 2006, disponible sur http://archive.ipu.org/news-f/24-4.htm

 

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Entretien de l'Union Interparlementaire (UIP) avec Anne-Marie Lizin, Présidente du Sénat belge