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Umoja : un village dans lequel les femmes font la loi

Editorial / Opinion Piece / Blog Post

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February 10, 2015

Umoja : un village dans lequel les femmes font la loi

Par Laetitia Hoarau

Cela fait plus de 20 ans que le village d’Umoja existe. Situé dans le Nord du Kenya, à 380 kilomètres de Nairobi, il a la particularité d’aller à l’encontre des sociétés patriarcales que connait la région. En effet, les hommes y sont interdits, et le village est habité par quelques dizaines de femmes et d’enfants. Depuis les années 1970 et jusqu’au début des années 2000, des centaines de femmes du peuple de Samburu, affirment avoir été victimes de viols de la part des soldats britanniques dans le Nord du Kenya. Certaines ayant raconté les faits, se sont fait battre, bannir et chasser par leur mari ou leur communauté. Quelques-unes d’entre elles décident alors de s’unir et de fonder le village d’Umoja, terme qui signifie « unité » en swahili, la langue officielle du Kenya. Les femmes que l’on appelle les Tumaï, ou « espoir de vie », s’y réfugient pour se protéger des hommes. Elles ont construit une vingtaine de huttes et accueillent, tel un lieu de refuge, de nombreuses femmes en détresse, battues ou maltraitées, des villages voisins. D’autre part, elles ont elles-mêmes bâtit un centre culturel et un camping pour les touristes, qui restent les seuls hommes tolérés dans le village. Les hommes de la tribu, voyant que le tourisme fonctionnait à Umoja, ont voulu eux aussi construire leur propre camping pour touristes, cependant sans grand succès.

Mais outre les constructions matérielles, les femmes d’Umoja ont aussi mis en place une vraie démocratie participative au sein du village, une démocratie 100% féminine. Si elles ont été souvent l’objet d’attaques de la part d’hommes qui n’étaient pas d’accord avec le mode de fonctionnement de ce village, elles reçoivent une aide internationale, qui leur a permis d’ouvrir des écoles pour les enfants. Les Tumaï défendent des valeurs primordiales pour la région, et luttent contre l’excision génitale des filles et des femmes, fortement pratiquée dans le pays. Cette lutte est d’ailleurs d’actualité puisque la journée internationale de tolérance zéro face aux mutilations sexuelles féminines a suscité de nombreux mouvements et soutiens le 6 février dernier. En outre, elles se battent contre le mariage forcé et enseignent aux petits garçons à aider leurs mères pour les tâches ménagères. Ainsi, elles interviennent lors de réunions dans des communautés voisines, afin de faire de la prévention contre la violence et le sida, deux fléaux encore trop répandus dans cette région. Enfin, elles se chargent aussi d’informer les populations sur leurs droits ou encore sur l’égalité des sexes. D’ailleurs, Rebecca Lolosoli, chef du village, ayant reçu de nombreuses menaces de mort, s'est rendue à New York, pour participer à une conférence de l’Organisation des Nations Unies, notamment sur les discriminations et les violences faites aux femmes.

Alors si le modèle de fonctionnement du village d’Umoja n’est pas paritaire entre les hommes et les femmes, il a surement permis à ces femmes détruites de se reconstruire et de prouver autour d’elles, qu’elles pouvaient être indépendantes et réussir. Pour une démocratie juste et égale, il faudrait tendre vers plus de parité politique. Mais avant cela, peut-être faudrait-il que les droits fondamentaux et la dignité des femmes soient respectés. 

Les femmes d'Umoja-© UmojaWomen

Par Laetitia Hoarau

Cela fait plus de 20 ans que le village d’Umoja existe. Situé dans le Nord du Kenya, à 380 kilomètres de Nairobi, il a la particularité d’aller à l’encontre des sociétés patriarcales que connait la région. En effet, les hommes y sont interdits, et le village est habité par quelques dizaines de femmes et d’enfants. Depuis les années 1970 et jusqu’au début des années 2000, des centaines de femmes du peuple de Samburu, affirment avoir été victimes de viols de la part des soldats britanniques dans le Nord du Kenya. Certaines ayant raconté les faits, se sont fait battre, bannir et chasser par leur mari ou leur communauté. Quelques-unes d’entre elles décident alors de s’unir et de fonder le village d’Umoja, terme qui signifie « unité » en swahili, la langue officielle du Kenya. Les femmes que l’on appelle les Tumaï, ou « espoir de vie », s’y réfugient pour se protéger des hommes. Elles ont construit une vingtaine de huttes et accueillent, tel un lieu de refuge, de nombreuses femmes en détresse, battues ou maltraitées, des villages voisins. D’autre part, elles ont elles-mêmes bâtit un centre culturel et un camping pour les touristes, qui restent les seuls hommes tolérés dans le village. Les hommes de la tribu, voyant que le tourisme fonctionnait à Umoja, ont voulu eux aussi construire leur propre camping pour touristes, cependant sans grand succès.

Mais outre les constructions matérielles, les femmes d’Umoja ont aussi mis en place une vraie démocratie participative au sein du village, une démocratie 100% féminine. Si elles ont été souvent l’objet d’attaques de la part d’hommes qui n’étaient pas d’accord avec le mode de fonctionnement de ce village, elles reçoivent une aide internationale, qui leur a permis d’ouvrir des écoles pour les enfants. Les Tumaï défendent des valeurs primordiales pour la région, et luttent contre l’excision génitale des filles et des femmes, fortement pratiquée dans le pays. Cette lutte est d’ailleurs d’actualité puisque la journée internationale de tolérance zéro face aux mutilations sexuelles féminines a suscité de nombreux mouvements et soutiens le 6 février dernier. En outre, elles se battent contre le mariage forcé et enseignent aux petits garçons à aider leurs mères pour les tâches ménagères. Ainsi, elles interviennent lors de réunions dans des communautés voisines, afin de faire de la prévention contre la violence et le sida, deux fléaux encore trop répandus dans cette région. Enfin, elles se chargent aussi d’informer les populations sur leurs droits ou encore sur l’égalité des sexes. D’ailleurs, Rebecca Lolosoli, chef du village, ayant reçu de nombreuses menaces de mort, s'est rendue à New York, pour participer à une conférence de l’Organisation des Nations Unies, notamment sur les discriminations et les violences faites aux femmes.

Alors si le modèle de fonctionnement du village d’Umoja n’est pas paritaire entre les hommes et les femmes, il a surement permis à ces femmes détruites de se reconstruire et de prouver autour d’elles, qu’elles pouvaient être indépendantes et réussir. Pour une démocratie juste et égale, il faudrait tendre vers plus de parité politique. Mais avant cela, peut-être faudrait-il que les droits fondamentaux et la dignité des femmes soient respectés.