Les quotas de genre: l’un des mécanismes-clés pour lutter contre la surreprésentation des hommes aux postes de direction politique et de prise de décision
Source: International IDEA
Par Rumbidzai Kandawasvika-Nhundu
Dans la plupart des sociétés de toutes les régions du monde, les inégalités entre les sexes et la discrimination à l'égard des femmes restent profondément ancrées du fait que les sociétés se caractérisent par des systèmes, des processus et des pratiques marqués par des mentalités discriminatoires, fondées sur le sexe.
Changer le discours = responsabilité partagée
Le besoin d'une transformation systémique des attitudes et des pratiques socioculturelles, des systèmes et processus juridiques et politiques, des stéréotypes de genre et des discours négatifs véhiculés par les différents médias, constitue un impératif afin d'assurer l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, dans toute leur diversité.
L'autonomisation des femmes, dans toutes les sphères de la vie, ne peut être réalisée sans la participation active des hommes et des garçons dans la remise en question des normes de genre rigides et des relations de pouvoir inégales entre les sexes, qui soutiennent et maintiennent les inégalités entre les sexes. Cela est dû au fait que les normes sociales et les stéréotypes de genre empêchent également les hommes et les garçons d’assurer leurs fonctions sociales et familiales. Il est essentiel que les hommes et les garçons s'engagent dans la défense de l'égalité des genres et de l'autonomisation des femmes. Au-delà de l'engagement rhétorique dans le plaidoyer, les hommes, dans toute leur diversité, doivent diriger au travers d’exemples pratiques portant sur le respect et la promotion des droits et des intérêts stratégiques des femmes et des filles.
Il existe de nombreuses preuves, à échelle mondiale, qui illustrent que l'égalité des droits qui existe dans la loi peut être niée dans la pratique, car ces droits ne se traduisent pas nécessairement en gains substantiels/dans la réalité. Par exemple, bien que de nombreux pays aient adopté des lois pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, leur application défaillante et les normes sociales discriminatoires restent des problèmes importants[1]. Ainsi, dans plusieurs pays, la capacité des femmes à se présenter à des postes électifs de pouvoir et de prise de décision est restreinte, en raison de la violence et des conflits politiques, la violence sexiste ainsi que les barrières culturelles, qui illustrent le scepticisme existant concernant la capacité de prise de décision des femmes et ne soutiennent pas leur participation et leadership. Par ailleurs, dans toutes les régions du monde, les femmes font face, continuellement, à diverses formes de violence, tels que le harcèlement sexuel dans les espaces publics, la violence en ligne, la cyberintimidation et le cyberharcèlement, qui empêchent les femmes de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux.
Les quotas de genre sont à la fois populaires et controversés
Il est de plus en plus évident que les quotas de genre constituent un mécanisme-clé afin de combler l'écart de représentation des genres existant, à tous les niveaux de la politique, de la direction politique et de la prise de décisions. Au total, 133 pays de toutes les régions du monde, disposent de quotas constitutionnels, électoraux ou de partis politiques, et il n'existe point de mécanisme «taille unique». Le niveau moyen de représentation des femmes dans les parlements ou les corps législatifs des pays soumis à des quotas est de 27 %, bien que les femmes, dans toute leur diversité, constituent généralement 50% de la population d'un pays donné.
La plupart des quotas visent à accroître la représentation des femmes car le problème à résoudre est la surreprésentation des hommes aux postes de pouvoir et de prise de décisions, à tous les niveaux. Ceci est essentiel pour garantir que les femmes aient les mêmes droits et opportunités de participer, être représentées et contribuer au fonctionnement du développement et de la construction de la démocratie. Atteindre la «minorité critique d'au moins 30%» de représentation des femmes aux postes de pouvoir et de prise de décision, à tous les niveaux, reste encore difficile. Pourtant, dans certains cas, il existe une forte résistance aux quotas ainsi que des questions sérieuses telles que:
- Pourquoi les quotas et comment ceux-ci peuvent contribuer à l'autonomisation politique des femmes?
- Les quotas électoraux de genre sont-ils antidémocratiques ou contribuent-ils au développement et à la construction de la démocratie?
Si le monde était équitable en matière de genre, il n'y aurait pas besoin de quotas de genre
L'inclusion d'un objectif à part entière, l’ODD 5, pour «autonomiser les femmes et les filles et défendre l’égalité de leurs droits», et la cible connexe 5.5 «Garantir la participation entière et effective des femmes et leur accès en toute égalité aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique», attestent d’un consensus mondial évident selon lequel l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, dans toute leur diversité, restent un objectif à atteindre, à l’échelle mondiale.
En outre, les quotas de genre sont ancrés dans la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, en particulier dans l'article 7, ainsi que dans le Programme d'action de Beijing.
Les quotas de genre ne suffiront pas à eux seuls à garantir les changements transformateurs indispensables. Les investissements durables pour aborder les normes, attitudes et perceptions sociales et culturelles rigides restent nécessaires en vue de parvenir à un changement vers l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes.
Les quotas de genre sont l'une des stratégies de l’approche Accès=Participation=Représentation=Transformation (APRT).
- Accès: remettre en question les normes de genre rigides et les relations de pouvoir inégales entre les sexes qui désavantagent les femmes, dans toute leur diversité, et créer des conditions favorables au travers de mécanismes, tels que les quotas ou autres mesures similaires, pour garantir l'accès des femmes à la politique et aux postes de prise de décisions.
- Participation: la présence physique des femmes, dans toute leur diversité, dans la prise de décisions politiques et les processus et institutions de direction, à tous les niveaux: la politique de présence et viser les bons chiffres.
- Representation: la participation va au-delà de la politique de présence afin d’obtenir une voix et une influence.
- Transformation: institutionnalisation systémique de l'intégration transformatrice du genre, à tous les niveaux, dans tous les processus, pratiques et systèmes de développement et de construction de la démocratie.
Les informations contenues dans cet article ont été originellement présentées au cours du briefing en ligne: "6th Gender Matters!", organisé par l’OSCE/BIDDH, où Rumbidzai Kandawasvika-Nhundu, conseillère principale d'International IDEA pour la démocratie et l'inclusion, a été invitée en tant que conférencière principale en vue de d’offrir un soutien et une formation spécialisée au personnel de l'OSCE sur les quotas de genre en tant que mesure efficace pour améliorer l'égalité des sexes en politique.
[1] Plan stratégique 2021-2025 d'ONU Femmes, septembre 2021, disponible sur https://undocs.org/en/UNW/2021/6, consulté le 3 mars 2022.
Source: International IDEA
Article traduit par iKNOW Politics.
Par Rumbidzai Kandawasvika-Nhundu
Dans la plupart des sociétés de toutes les régions du monde, les inégalités entre les sexes et la discrimination à l'égard des femmes restent profondément ancrées du fait que les sociétés se caractérisent par des systèmes, des processus et des pratiques marqués par des mentalités discriminatoires, fondées sur le sexe.
Changer le discours = responsabilité partagée
Le besoin d'une transformation systémique des attitudes et des pratiques socioculturelles, des systèmes et processus juridiques et politiques, des stéréotypes de genre et des discours négatifs véhiculés par les différents médias, constitue un impératif afin d'assurer l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, dans toute leur diversité.
L'autonomisation des femmes, dans toutes les sphères de la vie, ne peut être réalisée sans la participation active des hommes et des garçons dans la remise en question des normes de genre rigides et des relations de pouvoir inégales entre les sexes, qui soutiennent et maintiennent les inégalités entre les sexes. Cela est dû au fait que les normes sociales et les stéréotypes de genre empêchent également les hommes et les garçons d’assurer leurs fonctions sociales et familiales. Il est essentiel que les hommes et les garçons s'engagent dans la défense de l'égalité des genres et de l'autonomisation des femmes. Au-delà de l'engagement rhétorique dans le plaidoyer, les hommes, dans toute leur diversité, doivent diriger au travers d’exemples pratiques portant sur le respect et la promotion des droits et des intérêts stratégiques des femmes et des filles.
Il existe de nombreuses preuves, à échelle mondiale, qui illustrent que l'égalité des droits qui existe dans la loi peut être niée dans la pratique, car ces droits ne se traduisent pas nécessairement en gains substantiels/dans la réalité. Par exemple, bien que de nombreux pays aient adopté des lois pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, leur application défaillante et les normes sociales discriminatoires restent des problèmes importants[1]. Ainsi, dans plusieurs pays, la capacité des femmes à se présenter à des postes électifs de pouvoir et de prise de décision est restreinte, en raison de la violence et des conflits politiques, la violence sexiste ainsi que les barrières culturelles, qui illustrent le scepticisme existant concernant la capacité de prise de décision des femmes et ne soutiennent pas leur participation et leadership. Par ailleurs, dans toutes les régions du monde, les femmes font face, continuellement, à diverses formes de violence, tels que le harcèlement sexuel dans les espaces publics, la violence en ligne, la cyberintimidation et le cyberharcèlement, qui empêchent les femmes de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux.
Les quotas de genre sont à la fois populaires et controversés
Il est de plus en plus évident que les quotas de genre constituent un mécanisme-clé afin de combler l'écart de représentation des genres existant, à tous les niveaux de la politique, de la direction politique et de la prise de décisions. Au total, 133 pays de toutes les régions du monde, disposent de quotas constitutionnels, électoraux ou de partis politiques, et il n'existe point de mécanisme «taille unique». Le niveau moyen de représentation des femmes dans les parlements ou les corps législatifs des pays soumis à des quotas est de 27 %, bien que les femmes, dans toute leur diversité, constituent généralement 50% de la population d'un pays donné.
La plupart des quotas visent à accroître la représentation des femmes car le problème à résoudre est la surreprésentation des hommes aux postes de pouvoir et de prise de décisions, à tous les niveaux. Ceci est essentiel pour garantir que les femmes aient les mêmes droits et opportunités de participer, être représentées et contribuer au fonctionnement du développement et de la construction de la démocratie. Atteindre la «minorité critique d'au moins 30%» de représentation des femmes aux postes de pouvoir et de prise de décision, à tous les niveaux, reste encore difficile. Pourtant, dans certains cas, il existe une forte résistance aux quotas ainsi que des questions sérieuses telles que:
- Pourquoi les quotas et comment ceux-ci peuvent contribuer à l'autonomisation politique des femmes?
- Les quotas électoraux de genre sont-ils antidémocratiques ou contribuent-ils au développement et à la construction de la démocratie?
Si le monde était équitable en matière de genre, il n'y aurait pas besoin de quotas de genre
L'inclusion d'un objectif à part entière, l’ODD 5, pour «autonomiser les femmes et les filles et défendre l’égalité de leurs droits», et la cible connexe 5.5 «Garantir la participation entière et effective des femmes et leur accès en toute égalité aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique», attestent d’un consensus mondial évident selon lequel l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, dans toute leur diversité, restent un objectif à atteindre, à l’échelle mondiale.
En outre, les quotas de genre sont ancrés dans la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, en particulier dans l'article 7, ainsi que dans le Programme d'action de Beijing.
Les quotas de genre ne suffiront pas à eux seuls à garantir les changements transformateurs indispensables. Les investissements durables pour aborder les normes, attitudes et perceptions sociales et culturelles rigides restent nécessaires en vue de parvenir à un changement vers l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes.
Les quotas de genre sont l'une des stratégies de l’approche Accès=Participation=Représentation=Transformation (APRT).
- Accès: remettre en question les normes de genre rigides et les relations de pouvoir inégales entre les sexes qui désavantagent les femmes, dans toute leur diversité, et créer des conditions favorables au travers de mécanismes, tels que les quotas ou autres mesures similaires, pour garantir l'accès des femmes à la politique et aux postes de prise de décisions.
- Participation: la présence physique des femmes, dans toute leur diversité, dans la prise de décisions politiques et les processus et institutions de direction, à tous les niveaux: la politique de présence et viser les bons chiffres.
- Representation: la participation va au-delà de la politique de présence afin d’obtenir une voix et une influence.
- Transformation: institutionnalisation systémique de l'intégration transformatrice du genre, à tous les niveaux, dans tous les processus, pratiques et systèmes de développement et de construction de la démocratie.
Les informations contenues dans cet article ont été originellement présentées au cours du briefing en ligne: "6th Gender Matters!", organisé par l’OSCE/BIDDH, où Rumbidzai Kandawasvika-Nhundu, conseillère principale d'International IDEA pour la démocratie et l'inclusion, a été invitée en tant que conférencière principale en vue de d’offrir un soutien et une formation spécialisée au personnel de l'OSCE sur les quotas de genre en tant que mesure efficace pour améliorer l'égalité des sexes en politique.
[1] Plan stratégique 2021-2025 d'ONU Femmes, septembre 2021, disponible sur https://undocs.org/en/UNW/2021/6, consulté le 3 mars 2022.
Source: International IDEA
Article traduit par iKNOW Politics.